lundi 7 juillet 2008

29- La cure à Ax-Les-Thermes, la Mobilisation

La cure à Ax les Thermes interrompue nous quittons Oran sur le Ville D'Alger
En septembre 1939, la cure thermale du être abrégée : mobilisation générale, retour en catastrophe pour Turenne : un télégramme des chemins de fer ordonna à mon père de rejoindre son poste sans délai. Motif : déclaration de guerre. Nous faillîmes rester seuls sur les quais de la Joliette à Marseille vu que le télégramme ne mentionnait que Camille Martinez. Je ne vous décris pas l’affolement, les pleurs et les palabres de notre mère. Elle qui ne savait pas voyager seule, avec trois enfants, qui n’avait jamais rempli un permis. Enfin les choses s’arrangèrent
La traversée eut lieu sur un cargo : le gouverneur Général Jomard plein à craquer. Le rafiot leva l’ancre à 11 heures, l’heure où le Mistral se lève. Après avoir doublé le château d’If et perdu de vue la bonne Mère nous essuyâmes une tempête dans le golfe du Lion. Le chapeau à fleurs de ma mère passa par dessus bord, pendant que l’équipage donnait l’ordre de descendre dans les cales et y balançait les valises par les écoutilles. Une épidémie de mal de mer se propagea dans les cales ; beaucoup de marins y succombèrent tant l’atmosphère était irrespirable ; papa Raymond et moi avons tenu la mer jusqu’à l’heure du repas ; sur les tables zinguées se mêlaient victuailles et vomissures il faut manger, ne pas se coucher et avoir quelque chose à vomir : mangez ! Manger ! Nous répétait notre père. Nous abandonnâmes sa théorie après les deux allers retour du repas. Sorti du golfe et du tangage, un méchant vent d’est imprima au bateau et à nos estomacs un horrible roulis.
Nous débarquâmes à Alger parfumés au dégueulis, livides, le roulis , dans les jambes , déshydratés, réclamant à boire, Papa portait Janine, maman sa boite à chapeaux vide et des coliques qui la tenaillaient ,un porteur qu’il fallait surveiller s’occupait des valises. Nous avions la consigne de l’encadrer et de lui faire un placage … nous n’avions pas la forme pour assurer de telles responsabilités : mais nous étions costauds pour notre âge et ce jeu nous excitait : papa nous disait en bêguaiyant : - ou-ou-ouvrez les quinquets ! Cela voulait dire : surveillez le !
Mon père dégota une chambre à l’hôtel du square près du théâtre à droite du Tantonville pas loin de la gare. Sur les ânes du square Bresson nous eûmes droit à quelques balades en attendant un train en partance pour Oran et Turenne.
En gare d’Alger, des militaires partout, des convois, des chevaux, des automobiles, des tirailleurs, des sénégalais, des marins. Mon père profita de nous montrer l’Amirauté où il avait fait une partie de son régiment comme fourrier.
Un convoi militaro civil nous ramena au bercail à la vitesse de sécurité, s’arrêtant à toutes les gares.
Le retour dura trois jours. A toutes les gares on croisait des trains chargés de drôles de véhicules à chenilles ; Mon père nous expliqua : ce n’est pas un tracteur c’est un tank, un char d’assaut, c’est avec ça que les poilus ont gagné la guerre de 14. En fait les trains transportaient plus de cuisines de campagne, ce qui nous valait des commentaires du genre :
- L’intendance doit suivre ! Ou bien :
- Les Français n’oublieront pas leurs biscuits et leurs boites de singe
Les soldats mangent du singe papa ?
Mais non les enfants c’est du bœuf d’Australie, du corned beeff !
Et pourquoi on appelle ça du singe ?
C’est de la politique ! Ça permet aux vignerons français de vendre leur bistrouille à 9 degrés, alors que le vin algérien à 15 degrés est jeté au Chélif…Vous comprendrez plus tard !
Je crois que mon père ne comprenait pas tout lui aussi : un français moyen, de souche espagnole qui gagnait 800 francs par mois, qui n’achetait pas le journal, même à 5 sous et dont les préoccupations majeures étaient de nourrir sa famille, que les enfants obtiennent le certificat d’étude et qu’ils soient fonctionnaires…Les objectifs furent fixés très tôt.
Les vacances furent plus longues qu’à l’accoutumer. Monsieur Garcia fit une apparition en uniforme d’officier à deux gallons.
Depuis deux mois, la France était en guerre ; la rentrée des classes eu lieu tant bien que mal. Tous les esprits sont tournés vers les opérations qui se déroulent sur plusieurs fronts.
L’Allemagne a envahi la Pologne. Les chasseurs français, les Devoitines 520 enregistrent des succès. Sur une carte, le maître nous montre Varsovie, le couloir de Dantzig. En géographie, l’instituteur nous commente L’écho d’Oran : un combat naval se déroule dans l’estuaire du Rio de la Plata devant Montevidéo : trois croiseurs anglais obligent le fleuron de la marine allemande à se saborder. Nous étions ravis, La géographie et l’histoire en temps réel : la guerre serait vite finie.
Notre instituteur en uniforme disparu, laissant ses élèves les bras croisés attendant la suite du feuilleton…
Madame Garcia, plus belle que jamais, déménagea pour Décartes, son village natal, emmenant fistou et René Fleger : son fils et son jeune frère. La guerre se déroulait en Pologne, la bataille de Narvik faisait rage. Les convois passaient jour et nuit en direction de Casablanca au Maroc. Le feuilleton allait durer 5 ans.

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